Académique > Universités et écoles de commerce : entre mimétisme et distinction
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Qui a déjà essayé d’expliquer clairement le système éducatif français à l’étranger s’est cassé les dents sur la dualité entre les universités et les grandes écoles. La dichotomie n’est toutefois pas aussi rigide qu’on pourrait le croire, et cela est particulièrement visible au niveau des écoles de commerce.
Les IAE et les formations commerciales à l’université
Plus besoin d’aller en école de commerce pour faire une école de commerce. Afin de proposer leur propre « version » de l’enseignement commercial, plusieurs universités françaises ont créé leur Institut d’Administration des Affaires (IAE). Les formations, qui sont quasiment gratuites, attirent des pépites des universités.
Tout comme les grandes écoles, les IAE connaissent une hiérarchie. Le meilleur d’entre eux, et le plus ancien, à savoir l’IAE d’Aix-Marseille, se permet de pratiquer des frais de 8 000 € par an. Ces instituts sont sélectifs, car plus de 170 000 y candidatent chaque année pour leurs Licences et Masters ; seuls 34 000 environ y sont admis. Cela permet d’assurer un certain niveau académique aux heureux élus, ainsi que d’obtenir un poste à la sortie de l’école : en moyenne, l’insertion professionnelle des IAE est de 85 % en moins d’un an.
La question des salaires, autrefois épineuse à aborder en IAE, ne l'est plus aujourd'hui. Si les IAE se trouvaient auparavant bien derrière, les grilles de salaire des IAE d’Aix et de Paris sont comparables à celles des étudiants des écoles de commerce classiques, top 5 excepté (Gabriel Joly, « Les IAE, des écoles de commerce gratuites (ou presque) », L’Etudiant, 2020)
Au-delà des IAE, des grandes universités comme la Sorbonne (Paris I) et Dauphine (Paris X) ont compris qu’elles pouvaient délivrer des formations connexes à celles des écoles de commerce, dans un cadre sélectif, en jouant de leur prestige en France. Le Master 2 Finance de marché et Gestion des risques de la Sorbonne, ainsi que le Master d’entrepreneuriat de Dauphine, sont aujourd’hui très réputés dans les milieux de la finance et de l’entrepreneuriat.
Les doubles diplômes et partenariats
Les formations universitaires et les écoles de commerce se marient d’autant mieux que les deux formations sont complémentaires. Le droit reste aujourd’hui la chasse gardée des universités ; les grandes écoles de commerce qui proposent un double diplôme de management et de droit se tournent donc vers les universités, publiques ou privées.
La filière Business Law & Management de l’EDHEC permet l’obtention du master de l’école lilloise en même temps que du réputé master de droit des affaires de l’Université catholique de Lille ; l’ESCP Business School a fait le choix de l’international avec une double formation en partenariat avec la Queen Mary University of London.
Les AST, et l’école de commerce comme « finishing school »
Les Admissions Sur Titre ont pour objectif, pour les écoles de commerce, d’élargir leur recrutement. Les étudiants des classes préparatoires commerciales constituent certes encore le vivier premier de recrutement des cinq premières « sup de co » françaises, mais elles ont bien compris l’intérêt qu’elles avaient à permettre aux meilleurs étudiants de l’université et des prépas non commerciales de candidater. Les écoles gagnent à admettre les meilleurs étudiants issus des licences de droit, de mathématiques ou même de philosophie.
Les écoles de commerce constituent également pour certains postulants une « finishing school », c’est-à-dire une formation qui couronne une scolarité bien menée et lui accorde une plus-value dans son domaine de compétences. On voit ainsi des étudiants en droit des affaires rejoindre les masters d’écoles de commerce orientés vers le droit. La création de l’EDHEC Law Institute, ou du MS/LLM Droit et Management International d’HEC.
Les écoles de commerce françaises entretiennent ainsi un rapport ambigu avec les universités. Dans certains domaines, comme le management, elles continuent à primer ; mais elles ont compris la plus-value permise par la complémentarité d’un cursus universitaire solide associé à celui d’une grande école de commerce sélective.